Table des matières du livre : Ils l'ont découronné

Chapitre 17 - Les papes et le catholicisme libéral

" Le libéralisme catholique est un véritable fléau "
Pie IX

L’abbé Roussel a rassemblé dans son livre[1] toute une série de déclarations du pape Pie IX condamnant la tentative catholique libérale de marier l’Église et la Révolution. En voici quelques-unes, qu’il nous est bon de méditer.

" Ce qui afflige votre pays et l’empêche de mériter les bénédictions de Dieu, c’est ce mélange de principes. Je dirai le mot et ne le tairai pas ; ce que je crains, ce ne sont pas tous ces misérables de la Commune de Paris... Ce que je crains, c’est cette malheureuse politique, ce libéralisme catholique qui est le véritable fléau... Ce jeu de bascule qui détruirait la Religion. Il faut sans doute pratiquer la charité, faire ce qui est possible pour ramener ceux qui sont égarés ; il n’est cependant pas besoin pour cela de partager leurs opinions... " [2].

*

" Avertissez donc, vénérable Frère (l’Evêque de Quimper) les membres de l’Association Catholique que, dans les nombreuses occasions où Nous avons repris les sectateurs des opinions libérales, Nous n’avons pas eu en vue ceux qui haïssent l’Église et qu’il eût été inutile de désigner ; mais bien ceux que Nous venons de signaler, lesquels, conservant et entretenant le virus caché des principes libéraux qu’ils ont sucé avec le lait, sous prétexte qu’il n’est pas infecté d’une malice manifeste et n’est pas, suivant eux, nuisible à la Religion, l’inoculent aisément aux esprits, et propagent ainsi les semences de ces révolutions dont le monde est depuis longtemps ébranlé " [3].

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" Cependant, et bien que les enfants du siècle soient plus habiles que les enfants de la lumière, leurs ruses (des ennemis de l’Église) auraient sans doute moins de succès si un grand nombre parmi ceux qui portent le nom de catholiques, ne leur tendaient une main amie. Oui, hélas ! il y en a qui ont l’air de vouloir marcher d’accord avec nos ennemis, et s’efforcent d’établir une alliance entre la lumière et les ténèbres, un accord entre la justice et l’iniquité, au moyen de ces doctrines qu’on appelle " catholiques-libérales " , lesquelles, s’appuyant sur les principes les plus pernicieux, flattent le pouvoir laïque quand il envahit les choses spirituelles et poussent les esprits au respect, ou tout au moins, à la tolérance des lois les plus iniques, absolument comme s’il n’était pas écrit que personne ne peut servir deux maîtres. Or ceux-ci sont plus dangereux assurément et plus funestes que des ennemis déclarés, et parce qu’ils secondent leurs efforts sans être remarqués, peut-être sans s’en douter, et, parce que, se maintenant sur l’extrême limite des opinions formellement condamnées, ils se donnent une certaine apparence d’intégrité et de doctrine irréprochable, alléchant ainsi les imprudents amateurs de conciliation et trompant les gens honnêtes, lesquels se révolteraient contre une erreur déclarée. De la sorte, ils divisent les esprits, déchirent l’unité et affaiblissent les forces qu’il faudrait réunir pour les tourner toutes ensembles contre l’ennemi... " [4].

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" Nous ne pouvons que vous approuver d’avoir entrepris de défendre et d’expliquer les décisions de Notre Syllabus, surtout celles qui condamnent le Libéralisme soi-disant catholique, lequel comptant un grand nombre d’adhérents parmi les hommes honnêtes eux-mêmes, et paraissant s’écarter moins de la vérité, est plus dangereux pour les autres, trompe plus facilement ceux qui ne se tiennent pas sur leurs gardes et, détruisant l’esprit catholique insensiblement et d’une manière cachée, diminue les forces des catholiques et augmente celle des ennemis " [5].

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Que les catholiques libéraux osent, après de telles condamnations, refuser les qualificatifs de traîtres, de transfuges, d’ennemis dangereux de l’Église !
Voici, pour en finir avec le catholicisme libéral considéré en général, le jugement d’un témoin autorisé : Émile Keller, député français en 1865, dans son livre Le Syllabus de Pie IX — Pie IX et les principes de 89 :

" Quelle est donc cette transaction que l’on poursuit depuis de longues années et qui se formule aujourd’hui d’une façon de plus en plus pressante ? Quelle place veut-on faire à l’Église dans un édifice dont elle devait d’abord être exclue ? Libéraux et gouvernants l’acceptent volontiers pour auxiliaire. Mais se réservent en dehors d’elle et de son autorité leur pleine indépendance, leur souveraineté sans limite et leur entière liberté d’action. Ils lui abandonnent le domaine des consciences pourvu que de son côté elle leur livre la politique et qu’elle reconnaisse l’efficacité sociale des idées modernes connues sous le nom de principes de 89. Pris à ce piège séduisant bien des esprits généreux ne comprennent pas que ces propositions si modérées se puissent refuser. Les uns s’éloignent de l’Église s’imaginant, chose absurde, que réellement elle exige le sacrifice du progrès et de la liberté. Certains du contraire, mais n’osant pas nier la vertu des formules modernes, les autres font de laborieux efforts pour décider comme eux l’Église à la réconciliation qu’on lui offre. A force de bonne volonté ils croient s’être prouvé à eux-mêmes qu’à part quelques nuances, les principes de 1789 sont des purs principes chrétiens, qu’il serait habile de s’en emparer et de les amener graduellement et sans secousse à être reconnus et bénis du Saint-Siège " [6].

C’est cela ! C’est exactement ce qui s’est passé au moment du concile Vatican II : les libéraux ont réussi à faire bénir par le pape et par le Concile les principes de 1789. Je tâcherai de vous le montrer plus tard.

  1. Libéralisme et catholicisme, 1926.
  2. Aux pèlerins de Nevers, juin 1871.
  3. Bref à un cercle catholique de Quimper, 1873.
  4. Bref au Cercle catholique de Milan, 1873.
  5. Bref aux rédacteurs d’un journal catholique de Rodez, décembre 1876.
  6. Op. cit. p. 13.

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