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B. Le plan maçonnique d'infiltration de l'Eglise romaine


    Voici des extraits du plan d’infiltration de l’Église ro­maine, élaboré par la franc-maçonnerie italienne et découvert par la police du pape Pie IX: « Ce que nous devons chercher et attendre, comme les juifs attendent le messie, c’est un pape selon nos besoins [...]. Pour nous assurer un pape dans les proportions exigées, il s’agit d’abord de lui façonner, à ce pape, une génération digne du règne que nous rêvons. Laissez de côté la vieillesse et l’âge mûr; allez à la jeunesse [...]. Dans quelques années, ce jeune clergé aura, par la force des choses, envahi toutes les fonctions; il gouvernera, il administrera, il jugera, il formera le conseil du souverain, il sera appelé à choisir le pontife qui devra régner, et ce pontife, comme la plupart de ses contemporains, sera nécessairement plus ou moins imbu des principes [...] que nous allons commencer à mettre en cir­culation [...]. Que le clergé marche sous votre étendard en croyant toujours marcher sous la bannière des clefs apostoliques [...]. Vous aurez prêché une révolution en tiare et en chape, marchant avec la croix et la bannière, une révolution qui n’aura besoin que [...] d’être un tout petit peu aiguillonnée pour mettre le feu aux quatre coins du monde » (in: Crétineau-Joly: L’Église romaine en face de la révolution, 1859, réédition Paris 1976, 1. II, p. 82 - 90).

    À l’époque du concile de Vatican I, un haut dignitaire de la maçonnerie se réjouit de « l’appui précieux que nous trouvons depuis plusieurs années dans un parti puissant, qui nous est comme un intermédiaire entre nous et l’Église, le parti catholique libéral. C’est un parti que nous tenons à ménager, et qui sert nos vues plus que ne pensent les hommes plus ou moins éminents qui lui appartiennent en France, en Belgique, dans toute l’Allemagne, en Italie et jusque dans Rome, autour du pape même » (in: Mgr Delassus: Vérités sociales et erreurs démocratiques, 1909, réédition Villegenon 1986, p. 399).

    Léon XIII (encyclique Inimica vis, 8 décembre 1892) mit en garde l’épiscopat d’Italie. « Les sectaires maçons cherchent par des promesses à séduire le clergé inférieur. À quelle fin? [...] Ce qu’ils veulent, c’est de gagner doucement à leur cause les ministres des choses sacrées, et puis, une fois enlacés dans les idées nouvelles, d’en faire des révoltés contre l’autorité légitime ».

    Léon XIII mourut en 1903. La franc-maçonnerie souhaita l’élection d’un successeur imbu de l’esprit maçonnique. Voici le portrait du candidat idéal, esquissé en 1903 par la revue maçonni­que Acacia: « Un pape qui desserrerait les liens du dogmatisme tendus à l’excès, qui ne prêterait pas l’oreille aux théologiens fanatiques et dénonciateurs d’hérésies, qui laisserait les exégètes travailler à leur guise, se bornant à maintenir une unité qui serait plutôt une solidarité entre les diverses branches de l’Église, qui n’entrerait pas en lutte avec les gouvernements, qui pratiquerait et recommanderait la tolérance entre les autres religions, même envers la libre-pensée, qui ne renouvellerait pas l’excommunication de la franc-maçonnerie » (Acacia, septembre 1903, in: Lecture et Tradi­tion, no 94, mars/avril 1982).

    En 1903, les catholiques faillirent avoir pour pape, à la place de Giuseppe Sarto (Saint Pie X), le cardinal franc-maçon RampoIla, secrétaire d’État de Léon XIII. Il concentra sur lui la majorité des voix, mais fut écarté suite à l’intervention de l’Empire austro-hongrois.

    Malgré cet échec ponctuel, le plan maçonnique ne fonctionna que trop bien. Le pape saint Pie X (encyclique Notre charge apostolique, 25 août 1910) dénonça les infiltrations maçonniques dans le « Sillon » (mouvement de la jeunesse chrétienne française). « Nous ne connaissons que trop les sombres officines où l’on élabore ces doctrines délétères, qui ne devraient pas séduire des esprits clairvoyants. Les chefs du Sillon n’ont pu s’en défendre: l’exaltation de leurs sentiments, l’aveugle bonté de leur cœur, leur mysticisme philosophique mêlé d’une part d’illuminisme, les ont entraînés vers un nouvel évangile, dans lequel ils ont cru voir le véritable Évangile du Sauveur, au point qu’ils osent traiter Notre Seigneur Jésus-Christ avec une familiarité souverainement irrespec­tueuse, et que, leur idéal étant apparenté à celui de la révolution, ils ne craignent pas de faire entre l’Évangile et la Révolution des rapprochements blasphématoires ».

    Le clergé était également infiltré. Sentant les « modernistes » (clercs ayant adopté les principes maçonniques du rationalisme, du subjectivisme, de l’indifférence en matière de religion et de réforme de l’Église) rôder autour de lui, ce saint pape s’écria angoissé: « Ennemis de l’Église, certes ils le sont, et à dire qu’elle n’en a pas de pires, on ne s’écarte pas du vrai. Ce n’est pas du dehors, en effet, on l’a déjà noté, c’est du dedans qu’ils trament sa ruine; le danger est aujourd’hui presque aux entrailles mêmes et aux veines de l’Église » (encyclique Pascendi, 8 septembre 1907).

    Dans les années vingt, la conjuration avait pris des proportions alarmantes, car non seulement le bas clergé et la jeunesse, mais aussi une partie notable du haut clergé militaient désormais sous la bannière de la révolution. Lors du consistoire secret du 23 mai 1923, Pie XI interrogea une trentaine de cardinaux de la curie sur l’opportunité de convoquer un concile œcuménique. Le cardinal Boggiani estima qu’une partie considérable du clergé et des évêques étaient imbus des idées modernistes. « Cette mentalité peut incliner certains Pères à présenter des motions, à introduire des méthodes in­compatibles avec les traditions catholiques ». Le cardinal Billot était encore plus franc. Il exprima sa crainte de voir le concile « manœuvré » par « les pires ennemis de l’Église; les modernistes, qui s’apprêtent déjà, comme des indices certains le montrent, à faire la révolution dans l’Église, un nouveau 1789 » (in: Mgr Marcel Lefebvre: Ils l’ont découronné. Du libéralisme à l’apostasie. La tragédie conciliaire, Escurolles 1987, p. 158 - 159).

    À la mort de Pie XII, le rêve de la maçonnerie se ré­alisa: une « révolution en tiare et en chape ». Angelo Roncalli (qui s’était fait initier dans une société secrète en Turquie en 1935, puis s’était affilié à une loge maçonnique à Paris) prit le nom de « Jean XXIII ». Il convoqua Vatican II, qui bouleversa entièrement la reli­gion, par exemple en proclamant la « liberté de pensée, qui, partie de nos loges maçonniques, s’est étendue magnifiquement au-dessus du dôme de Saint Pierre » (Yves Marsaudon: L‘œcuménisme vu par un franc-maçon de tradition, 1964, p. 121).

    Les partisans du changement s’appellent « conciliaires » (nom dérivé du « conciliabule » Vatican II). Les opposants s’appellent « catholiques » (en raison de leur attachement au catholicisme).

* * *

    Depuis 1958, Rome prend le contre-pied de ce que la papauté a toujours enseigné. Certaines personnes font alors le syllogisme suivant: toutes les fois qu’il ne définit pas solennellement ex cathedra un dogme, un pape peut se tromper. C’est pourquoi on n’est pas tenu de lui obéir, chaque fois qu’il enseigne ou commande quelque chose de contraire à la foi. Les hommes au pouvoir à Rome depuis 1958 profèrent des hérésies, mais pas ex cathedra. Donc ces hommes sont papes.

    D’autres personnes établissent un syllogisme différent: l’enseignement ex cathedra est véhiculé non seulement par le mode « extraordinaire » (définitions solennelles), mais encore par le mode « ordinaire » (écrits de tous les jours). Un pape ne se trompe à aucun moment dans le domaine de la foi, car il est sans cesse assisté par le Saint-Esprit, conformément à la promesse formelle du Christ (Jean XIV, 15 - 17). « Comment un pape vrai successeur de Pierre, assuré de l’assistance de l’Esprit-Saint, peut-il présider à la destruction de l’Église? » (Mgr Lefebvre, in: Bonum certamen, no 132, Nancy). Cette défaillance ne serait-elle pas le signe que les hommes gouvernant le Vatican depuis 1958 ne sont pas de véritables papes, mais des usurpateurs, des occupants illégitimes du Siège de Pierre?

    Ces façons d’envisager le problème sont logiques toutes les deux. Seulement, un syllogisme peut être logique tout en étant faux. Car tout dépend des prémisses desquelles on tire une conclusion. Si une prémisse est fausse, on arrive, par un raisonnement en lui-même logique, à une conclusion fausse. Avant de commencer à raisonner en bon logicien, il est donc indispensable de s’assurer que les bases sur lesquelles s’appuie le raisonnement correspondent à la réalité. « La plupart des erreurs des hommes viennent moins de ce qu’ils raisonnent mal en partant de principes vrais, que de ce qu’ils raisonnent bien en partant de jugements inexacts ou de principes faux » (Charles Augustin Sainte-Beuve: Causeries du lundi, Paris 1851-1862, t. X, p. 36)

    Afin de ne point raisonner dans le vide, nous avons entrepris une vaste enquête théologique, historique et canonique. Nous avons recueilli bien des informations et documents, afin de constituer une base très solide à cette étude, dont le plan est exposé au point suivant.


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