Virgo-Maria.org

Qui et Pourquoi, depuis la mort de Mgr Lefebvre en 1991, a détourné la finalité surnaturelle de l’OPERATION-SURVIE des sacres de 1988, pour assigner à la FSSPX ce FAUX objectif prioritaire de la «ré-conciliation» avec la Rome conciliaire (en fait la «ré-conciliarisation» de la FSSPX) ?

Qui a, depuis 2000, PROMU, et Pourquoi, le FAUX préalable de l’autorisation de la messe de Saint Pie V ?

Pourquoi n’a-t-on pas posé la VRAIE question du rétablissement du VRAI Sacerdoce de VRAIS prêtres, ordonnés par des Evêques VALIDEMENT sacrés selon le rite VALIDE des Saints Ordres ?

Qui a INVENTE, et POURQUOI, le faux préalable de la levée des «excommunications» ?

Pourquoi n’a-t-on pas posé la VRAIE question de l’abrogation de Pontificalis Romani INVALIDE de 1968 et du rétablissement du vrai rite de la consécration épiscopale VALIDE d’avant 1968?

A quoi servirait-il, en effet, de faire dire le VRAI rite de la messe par de FAUX prêtres ?

Serait-ce donc qu’après avoir obligé de VRAIS prêtres à dire une FAUSSE messe, l’on veuille désormais faire dire la messe du VRAI rite par de FAUX prêtres ?

Serait-ce que l’on veuille «concilier» les VRAIS prêtres qui disent encore la VRAIE messe avec un clergé aussi INVALIDE que le FAUX CLERGE ANGLICAN ?

Gaude, Maria Virgo, cunctas hæreses sola interemisti.

(Tractus Missæ Salve Sancta Parens)

mercredi 28 juin 2006,

Année du 577è anniversaire du "Christ Roi de France" : Vive le Christ Roi de France

Fideliter renie Mgr Lefebvre

Le théologien de Mgr Fellay prépare les fidèles à

"La réconciliation avec la Rome conciliaire"

L’abbé Celier-Beaumont liquide la doctrine du Christ-Roi avec le soutien de l’abbé de Cacqueray

Nous avons tous en mémoire combien Mgr Lefebvre était attaché au combat du Christ-Roi. Il a même consacré tout un ouvrage (dont on ne parle plus !) à ce sujet : Ils L’ont découronné, éditions Fideliter, 1987. Tout catholique, tout français, est passionné du Christ Roi, d’autant plus que nous savons qu’Il veut Régner sur la France et par la France sur le monde. C’est ce critère qui permet de mieux définir les camps.

Il y a les héritiers de ceux qui "ne veulent pas qu’Il Règne sur nous" (Luc, xix, 14) facilement reconnaissables car ils en ont en haine la Vocation et la Mission de la France. Tout, mais pas "cela".

Malheureusement "cela", c’est la Volonté de Dieu : "Je régnerai malgré Mes ennemis" (une trentaine de fois à sainte Maguerite-Marie !) Et ils osent aller contre la Volonté de Dieu ! La leçon de Ses ennemis il y a deux mille ans ne leur a pas suffit !

Depuis toujours "cela" permet de savoir qui est qui.

Le directeur de Fideliter, spécialiste des signatures pseudos ou anonymes (les plus connus étant Paul Sernine et abbé Michel Beaumont), défendit en janvier 2005 une "étrange théologie" qui semble bien être une caution au rapprochement romain déjà poursuivi depuis lontemps. Pour ce but ils sont prêts à tout, en voici la preuve !

Il est sûr que cet article a eu l’accord des supérieurs et est un clignotant de plus prouvant la volonté de Mgr Fellay de se réconcilier. Cette théologie renie tout le combat de Mgr Lefebvre pour le Règne de N-S J-C.

Depuis quelques semaines on répète à divers interlocuteurs inquiets "qu’il n’est pas question de signer". Mais on ne l’écrit nulle part ! En revanche on omet d’instruire les fidèles sur ce qui gênerait Rome (censurant même les évêques, la dernière censure en date est celle du texte de Mgr Tissier de Mallerais aux Etats-Unis[1]), on répand tout ce qui favorise une "réconciliation" et on attaque violemment ceux qui persévèrent à combattre contre tout rapprochement. Il n’y a que les aveugles volontaires pour ne pas comprendre !

Voici in-extenso l’article de l’abbé Célier (sous le pseudonyme d’abbé Beaumont) paru dans le n° 163 de Fideliter, janvier-février 2005. Notons que l’article est passé en décembre 2004 devant le comité de lecture de la revue qui comprend plusieurs clercs. Ils furent donc d’accord pour le passer. TRISTE !

Début de l’article de Fideliter

ENGAGEMENT CHRÉTIEN EN POLITIQUE

RÉflÉchir en chrÉtien sur la politique actuelle

Abbé Michel Beaumont, FIDELITER n° 163, janvier-février 2005

Depuis la mort de Pie XII, le Magistère (notamment celui qui porte sur la morale politique) est entré dans une zone d'incertitude. Or, pendant les cinquante dernières années, de nouvelles réalités politiques et sociales sont apparues. Il est donc nécessaire que les catholiques engagés en politique, à la lumière de la doctrine catholique, fassent eux-mêmes le travail de réflexion que les papes leur proposaient autrefois.

Il existe une doctrine classique des papes sur le rapport entre le pouvoir et la religion catholique. On peut la résumer : les États ont le devoir d'honorer Dieu par la pratique publique de la vraie religion.

Les papes, dans leurs enseignements doctrinaux sur les devoirs religieux de l'État ou société politique (principa­lement Immortale Dei et Libertas de Léon XIII, ainsi que Quas primas de Pie XI), supposent la foi catholique : c'est, fort logiquement, par la médiation de la foi (l'Église ayant pouvoir, en soi et directement, sur les baptisés) qu'ils arrivent à la pratique de la vrai religion par l'autorité publique. Ils parlent donc pour des sociétés où, au minimum, «la religion catholique est la religion de la majorité des citoyens». Cette majorité catholique constitue à leurs yeux la base d'une certaine unanimité morale.

Les papes s'adressent à une «sociÉtÉ catholique»

Dans ces enseignements doctrinaux, même lorsqu'ils traitent de cas limites (l'exemple le plus frappant étant Ci riese de Pie XII sur la tolérance du mal), les papes se situent toujours dans l'optique d'une «société catholique», qui doit prendre en compte des réalités religieuses minoritaires.

Certes, les souverains pontifes reconnaissent que l'existence d'une «société catholique» n'est pas universelle. En de nombreux pays, l'Église est implantée en une société à majorité non catholique. A notre connaissance toutefois, jusqu'à Pie XII, il n'existe pas de document doctrinal traitant des obligations religieuses d'un État non catholique.

Lorsqu'il arrive aux papes d'intervenir pour protéger les catholiques de ces pays (en cas de difficultés), ils adressent aux autorités politiques des documents d'ordre diplomatique, qui utilisent des arguments juridiques, historiques, humanitaires, philosophiques (incluant la religion naturelle), mais non à proprement parler théologiques et surnaturels.

Une conception classique de l'État

Lorsqu'ils adressent des enseignements doctrinaux à une «société catholique», les papes se réfèrent en même temps à une «conception classique» de l'autorité politique et de l'État. En gros, ils parlent à une communauté politique où un dux (roi, président, Premier ministre, etc.) a la charge de mener le peuple vers un bien commun défini par des valeurs spirituelles, culturelles et matérielles proprement humaines. C'est à cet État, à cette autorité politique, à ce dux qu'ils rappellent le devoir d'honorer Dieu par la pratique publique de la véritable religion.

Incertitudes depuis la mort de Pie XII

Cet enseignement, proposé de façon systématique par Léon XIII, fut mis à jour par ses successeurs au fur et à mesure des diverses évolutions politiques et sociales que connaissait le monde. Rappelons, par exemple, les grands discours de Pie XII durant les Noëls de la Guerre mondiale (notamment à propos de la démocratie), ou son discours Ci riese de 1953 sur la tolérance, à propos de l'Union européenne.

A partir de la mort de Pie XII, le Magistère est entré dans une zone d'incertitude et n'a plus mis à jour de façon fiable ce corpus doctrinal. Or, pendant ces cinquante dernières années, des réalités politiques et sociales incontestablement nouvelles sont apparues. Pour le manifester, nous proposons, conformément aux prémisses que nous venons de poser, d'examiner deux questions cruciales : Peut-il, aujourd'hui, encore exister une société majoritairement catholique ? Existe-t-il aujourd'hui encore un État classique ?

Peut-il exister une sociÉtÉ catholique ?

Peut-il exister encore, en n'importe quel point de la terre, une société majoritairement catholique ? La question n'est pas de fait, mais de droit. Car la mondialisation semble faire de toute société, de tout État-nation, un simple territoire du «village global». De ce fait, même un pays qui comprendrait une majorité de catholiques verrait cette majorité devenir automatiquement minorité dans le cadre du «pays-monde».

Cette mondialisation touche les personnes, les marchandises, les institutions, les informations, la santé, l'opinion publique, etc.

La mondialisation des personnes est d'abord temporaire, par le tourisme : chaque année, la France accueille 70 000 000 de touristes, soit plus que sa population propre. Cette mondialisation des personnes est ensuite semi-temporaire, par l'expatriation universitaire et économique : on compte actuellement 2 000 000 de Français vivant hors de France. Cette mondialisation des personnes est enfin définitive, par l'émigration/ immigration : la France compte actuellement 6 000 000 d'étrangers stables, entrés dans notre pays depuis moins de trente ans et appelés à devenir français.

La mondialisation des marchandises fait circuler, de plus en plus librement entre des économies sans cesse plus interdépendantes, à peu près tous les produits et tous les biens économiques. La possibilité d'achats à distance grâce à internet ne fait que renforcer cette accessibilité.

Les diverses facettes de la mondialisation

La mondialisation de la santé fait que des épidémies humaines se répandent dans le monde entier, par le biais notamment des voyages. Les moyens de lutte (OMS, médicaments) sont également mondialisés.

La mondialisation des institutions fait que tout pays est partie prenante de traités internationaux et de structures interétatiques (Union européenne, OMC, ONU, OTAN, Interpol, OMPI, OCDE, etc.) dont les normes sont, en général, contraignantes pour chacun des membres.

La mondialisation des informations fait que sont désormais immédiatement accessibles des informations venues de toutes parts (radio, télévision, internet). Les progrès technologiques rendent aujourd'hui à peu près impossible le dessein d'empêcher cette circulation.

Du fait notamment de la mondialisation des institutions et des informations, s'est créée une «opinion publique mondiale» qui peut agir, soit directement (manifestations, boycott), soit indirectement par le biais de la culture, du sport, des institutions internationales, etc.

Une disqualification de l'État catholique ?

Si, en vertu de l'actuelle mondialisation, tout pays, devenu un simple territoire du «village global», se trouve inséré dans une entité politique où les catholiques sont très nettement minoritaires, comment la doctrine classique des papes demandant qu'un pays majoritairement catholique reconnaisse le règne du Christ dans ses institutions politiques serait-elle encore possible ? Dans cette hypothèse, nous assisterions à la disparition radicale de la notion d'une «société majoritairement catholique» et donc, par conséquent, du concept d'État catholique, au sens où l'entendaient les papes.

Ce qui n'empêche que, dans tel territoire du «pays-monde», un statut légal, même privilégié, puisse exister pour l'Église catholique en fonction de circonstances historiques. Le projet de Constitution européenne le permet explicitement, et nous en avons l'expérience en Alsace-Moselle. Mais il s'agira simplement d'une particularité historico-culturelle, non plus d'un État catholique au sens propre, ce concept étant devenu inopérant par disparition de son fondement (la «société majoritairement catholique») englouti dans le grand magma de la mondialisation.

Progressive dilution des États nations

Les papes, avons-nous noté également, lorsqu'ils parlent à cette «société catholique» (dont nous venons de dire qu'elle semble virtuellement disqualifiée), s'adressent à un «État classique», où un dux (roi, président, Premier ministre, etc.) a pour charge de mener le peuple vers un bien commun défini par des valeurs spirituelles, culturelles et matérielles proprement humaines. Or, les évolutions sociales récentes font penser que cette conception ne correspond plus à la réalité des pouvoirs politiques actuels, non plus qu'à la «délégation» que les citoyens leur accordent.

La dissolution du pouvoir politique, son éclatement entre de multiples nouveaux centres de pouvoir, est une réalité qui ne cesse de s'affirmer. Officiellement, la «République française» est censée être notre cadre de vie. En réalité, une part toujours croissante en est définie au sein des institutions européennes. Mais ceci même est un leurre. Car notre mode de vie est défini de plus en plus au sein d'institutions mondiales comme l'OMC, le FMI, le G7, l'ONU, l'OPEP.

Nos forces armées sont actuellement déployées à travers le monde en vertu de décisions d'instances internationales. Le sort de la paysannerie française ou de la culture française (livres, musique, films, etc.) se joue chaque jour dans des négociations entre les États-Unis et l'Union européenne, ou au sein de l'OMC.

Notre cadre de vie est déterminé de plus en plus par des entreprises transnationales d'une puissance économique sans équivalent dans l'Histoire. Actuellement, sur les 100 premières entités économiques mondiales, si 50 sont des États, 50 sont des multinationales. Or les Nations Unies comptent 190 États : 140 États sont donc moins puissants économiquement que certaines entreprises.

A l'inverse, le pouvoir tend à se diluer dans des entités de plus en plus petites : en raison des transferts de souveraineté dus à la décentralisation, le rôle des régions, par exemple, devient de plus en plus important au fur et à mesure du temps.

Du bien commun À la gestion des droits

En sorte que la capacité d'action des États nationaux classiques se réduit chaque jour davantage. Le Parlement a pour fonction de voter le budget et de voter la loi. Or, le pouvoir du Parlement porte sur 5 % environ du budget (le reste étant des «charges constatées d'avance»), et doit se tenir dans les limites des traités internationaux et des directives européennes, qui représentent une part toujours croissante de la législation.

Après le bombardement de la basilique Saint-Laurent de Rome et du quartier populaire voisin, pendant la guerre, le pape Pie XII vient réconforter la population et porter du secours.

En fait, les centres de pouvoir se dépolitisent progressivement, pour s'orienter vers une sorte de gestion administrative d'un espace public permettant à chaque citoyen de vivre, dans le respect des droits d'autrui, son «projet personnel de vie». On se rapproche de plus en plus du modèle du conducteur de train, lequel ne décide pas des raisons de voyager propres à chacun, mais se contente d'offrir un service technique de voyage. Or, une pure administration pragmatique, orientée vers l'efficacité technique et la protection des droits individuels, est par définition dans l'incapacité de définir un bien commun vertueux, a fortiori de dire quelle est la vraie religion.

Cette dépolitisation des centres de pouvoir correspond en fait à une demande croissante des citoyens, qui veulent un État serviteur de leur projet personnel de vie (ce dernier fût-il parfaitement catholique), et de moins en moins un État qui recherche un bien commun vertueux auquel les citoyens adhèrent et se soumettent. Et ne nous faisons pas d'illusion : nous sommes bien nous-mêmes les fils de notre siècle, beaucoup plus attachés à nos droits (même les plus saints : droit de se sanctifier, par exemple) qu'à un bien véritablement commun.

RÉflÉchir À ces nouvelles conditions

Certes, la mondialisation n'est pas encore complètement réalisée, et l'État-nation résiste au moins en partie. Certes, l'État classique n'a pas, contrairement à l'Empire romain, définitivement disparu au profit d'une autorité purement administrative et technique. Mais déjà, les prémisses de cette situation sont en place et produisent leurs effets. Par ailleurs, à vue humaine, la situation ne peut que s'aggraver, la mondialisation progressant chaque jour et l'État classique se réduisant comme peau de chagrin.

Mais l'absence d'éclairage magistériel certain sur ces nouveaux problèmes de notre temps demande aux catho­liques qui s'engagent en politique, comme ils doivent le faire, d'être fortement armés «de science historique, de saine philosophie et de forte théologie», ainsi que l'écrivait saint Pie X à propos du Sillon.

Fin de l’article de Fideliter

Dans ce texte, l’abbé Célier-Beaumont entend se donner toutes les apparences de l’objectivité et s’engager à réfléchir sur ces nouvelles conditions politiques imposées par le monde moderne. Mais signalons déjà que sa présentation de la mondialisation est puérile, naïve et fausse : elle ne reflète pas la réalité.

Les anciens et ceux qui sont fortement armés «de science historique, de saine philosophie et de forte théologie», ainsi que l'écrivait saint Pie X à propos du Sillon, y découvrent un discours déjà bien connu. Ce fut toute la thèse imposée à Vatican II. Ce fut tout le reniement de Vatican II.

Lecture et Tradition a publié une réfutation de l’article de l’abbé Celier-Beaumont dans son numéro de mars 2006.

Selon nos sources cet article de Lecture et Tradition proviendrait d’un moine d’Avrillé. L’histoire serait la suivante. Cette réponse d’un moine d’Avrillé à l’abbé Celier aurait été refusée par le "comité de lecture" du Le Sel de la Terre qui, obéissant ainsi au veto de Suresnes n’aurait donc pas passé la réponse à l’abbé Celier qui s’imposait. Conscient de la gravité d’une telle position, ce moine d’Avrillé aurait quand même fait passer sa réponse (qui lui aurait été refusée par le Sel de la terre) par Lecture et Tradition. Ce serait l’origine du texte publié dans son dernier numéro.

Signalons que l’abbé de Cacqueray est membre de ce Comité de lecture du Sel de la terre. Tout ceci viendrait mettre en évidence une collusion objective Fideliter-Vehementer entre l’abbé Celier et le Père Pierre-Marie d’Avrillé, Directeur du Sel de la terre. Et cette information qui nous a été transmise ne ferait alors que corroborer ce que, sur la base des études de Rore Sanctifica, nous constatons depuis 8 mois dans l’affaire de l’invalidité du nouveau rite de consécration épiscopale, à savoir que l’abbé Schmidberger et le Père Pierre-Marie d’Avrillé sont parfaitement en phase. Le dominicain a accepté de reprendre à son compte en septembre 2005 la pseudo-démonstration de Dom Botte, diffusée au sommet de la FSSPX depuis 1982 par l’abbé Schmidberger. Le réseau allemand (abbé Gaudron et abbé Pfluger) fut associé à l’opération.

Voici la réfutation de l’abbé Celier-Beaumont in extenso, nos commentaires suivront.

Début de l’article de Lecture et Tradition

Lecture et tradition n° 349, mars 2006, p. 24-30

L'Étrange thÉologie de l'abbÉ Michel Beaumont

M. l'abbé Michel Beaumont a publié, dans la revue Fideliter (n° 163, janvier-février 2005, p. 20 et sq) un étonnant article intitulé "Réfléchir en chrétien sur la politique actuelle". Il estime qu'il faut revoir l'enseignement de l'Église en matière de morale politique, du fait de deux phénomènes nouveaux :

La mondialisation, qui rend problématique – voire impossible – l'existence d'une société catholique. M. l'abbé Beaumont précise : La question n'est pas de fait, mais de droit [p. 22].

Si, en vertu de l'actuelle mondialisation, tout pays, devenu un simple territoire du "village global", se trouve inséré dans une entité politique où les catholiques sont très nettement minoritaires, comment la doctrine classique des papes, demandant qu'un pays majoritairement catholique reconnaisse le règne du Christ dans ses institutions politiques, serait-elle encore possible ? Dans cette hypothèse, nous assisterions à la disparition radicale de la notion d'une "société majoritairement catholique" et donc, par conséquent du concept d'État catholique, au sens où l'entendaient les papes [p. 23].

Sans doute, nous dit l'abbé Beaumont, il pourra exister un statut légal particulier pour l'Église catholique dans certaines régions, "mais il s'agira simplement d'une particularité historico-culturelle, non plus d'un État catholique au sens propre, ce concept étant devenu inopérant par disparition de son fondement (la "société majoritairement catholique") englouti dans le grand magma de la mondialisation" [p. 23].

Ainsi, dans un tel contexte, la doctrine des papes sur le règne social de Notre-Seigneur Jésus-Christ serait à revoir, du fait qu'aucun pays ne pourrait être réellement catholique à la manière dont ces papes l'entendaient.

2° Autre phénomène nouveau : l"'État classique", où un dux (roi, président, premier ministre, etc.) a pour charge de mener le peuple vers un bien commun défini par des valeurs spirituelles, culturelles et matérielles proprement humaines, est en train de disparaître.

On se rapproche de plus en plus du modèle du conducteur de train, lequel ne décide pas des raisons de voyager propres à chacun, mais se contente d'offrir un service technique de voyage. Or, une pure administration pragmatique, orientée vers l'efficacité technique et la protection des droits individuels, est par définition dans l'incapacité de définir un bien commun vertueux, a fortiori de dire quelle est la vraie religion [p. 25].

Ainsi l'État ne serait plus en mesure, actuellement, de remplir son rôle d'aider les hommes à faire leur salut, et la doctrine classique des papes sur la question serait à revoir.

*

Ainsi, du fait de ces deux phénomènes nouveaux, la doctrine des papes jusqu'à Pie XII serait obsolète. Que faut-il faire ? M. l'abbé Beaumont nous l'indique :

Il est donc nécessaire que les catholiques engagés en politique, à la lumière de la doctrine catholique, fassent eux-mêmes le travail de réflexion que les papes leur proposaient autrefois. [...] L'absence d'éclairage magistériel certain sur ces nouveaux problèmes de notre temps demande aux catholiques qui s'engagent en politique, comme ils doivent le faire, d'être fortement armés "de science historique, de saine philosophie et de forte théologie", ainsi que l'écrivait saint Pie X à propos du Sillon [p. 20 et 25].

Toutefois, ce "travail de réflexion" M. l'abbé Beaumont ne le fait pas. Pas plus qu'il ne donne les principes "de science historique, de saine philosophie et de forte théologie" qui permettraient de résoudre la question.

Ces deux omissions entraînent deux graves conséquences :

- Le doute est semé dans l'esprit des lecteurs, qui se diront que la doctrine traditionnelle de l'Église ne s'applique plus à la situation actuelle : aujourd'hui, il ne peut exister de société catholique et l'État moderne est très éloigné de l'État classique ; or les papes s'adressaient, dans le passé, à un État classique pour l'inciter à former une société catholique.

- Plus grave : certains seront tentés de formuler une nouvelle doctrine applicable à notre époque. Puisqu'il ne peut plus exister de société catholique, il ne faut pas que l'Église s'obstine à réclamer la royauté sociale de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Une telle réclamation était valable autrefois, mais ne l'est plus aujourd'hui.

- La tentation peut aller encore plus loin : s'il s'agit d'une question de droit et non pas de fait, pourquoi ne pas chercher à concevoir un droit nouveau valable pour notre époque, où l'impossibilité de la royauté sociale de Notre-Seigneur Jésus-Christ serait entérinée ? Nous aurions alors un enseignement sur la liberté religieuse du même genre que celui de Dignitatis humanæ, même si cet enseignement était fondé sur d'autres principes. La réconciliation avec la Rome conciliaire deviendrait alors envisageable.

Remarquons à ce sujet que le libéralisme classique ne prétend pas changer la doctrine de l'Église : il distingue la thèse (la doctrine) et l'hypothèse (la réalité des faits). Devant l'hypothèse, le libéralisme affirme que la thèse n'est pas applicable.

A Vatican II, on a prétendu changer le droit même de l'Église (la thèse). Désormais, si l'on veut se réconcilier avec la Rome conciliaire, c'est bien un tel changement qu'il faut envisager ; et l'on pourrait être tenté de le faire, si l'étrange théologie de M. l'abbé Beaumont était vraie.

*

Il nous faut remarquer que toute cette argumentation repose sur un certain nombre de sophismes. Le premier est l'affirmation selon laquelle l'Église n'aurait pas d'enseignement à donner à une société où la religion catholique n'est pas la religion de la majorité des citoyens. Ce sophisme s'appuie sur l'argument de "l'enseignement des papes"[2] :

Les papes dans leurs enseignements doctrinaux [...] supposent la foi catholique. [...] Ils parlent donc pour des sociétés où, au minimum, "la religion catholique est la religion de la majorité des citoyens".

Ainsi, puisque les papes, "dans leurs enseignements doctrinaux", n'ont pas traité ex professo la question d'une société où la religion catholique n'est pas la religion de la majorité des citoyens, il semble que l'Église n'a pas d'enseignement valable pour la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui. Le docte abbé oublie de nous rappeler que l'Église a aussi pour mission d'enseigner le décalogue, et que le décalogue représente une loi naturelle valable pour tous les hommes – et tous les Etats – même non catholiques. Avant le concile Vatican II, la commission théologique dirigée par le cardinal Ottaviani avait préparé un schéma sur les rapports de l'Église et de l'État[3]. Il rappelle d'abord les devoirs religieux du pouvoir civil en général (principes généraux applicables aussi aux Etats non-catholiques), puis, après un chapitre sur le "Principe général d'application de la doctrine exposée" et deux chapitres d'application à une société catholique, il a tout un chapitre intitulé : "Application dans une cité non catholique". Pour ne pas allonger cette recension, nous donnons ce texte en annexe.

L'Église a donc bien donné un enseignement sur la question qui se pose aujourd'hui : il est sophistique de parler de "[...] l'absence d'éclairage magistériel certain sur ces nouveaux problèmes de notre temps" et il est dangereux d'inviter "les catholiques engagés en politique [...] [à faire] eux‑mêmes le travail de réflexion", comme s'il fallait imaginer une nouvelle doctrine.

*

Un autre sophisme sur lequel repose l'argumentation de M. l'abbé Beaumont est de supposer le phénomène de la mondialisation – et donc ses conséquences (la disparition supposée de l'État catholique et même de l'État classique) –, comme un fait inéluctable devant lequel on ne pourrait rien faire. Pourtant il serait bon de rappeler que la mondialisation actuelle est menée par la Franc-maçonnerie et par les forces occultes dont le but est la "reconstruction du Temple", c'est-à-dire l'unification politique et religieuse du monde. Devant cette agression, la première chose à faire serait de désigner l'ennemi, afin d'organiser efficacement la résistance. Ensuite, il faudrait rappeler que les forces du mal, si puissantes soient-elles, sont déjà vaincues par Notre-Seigneur Jésus-Christ. Tant que la grâce restera la grâce, c'est-à-dire une force qui vient de Dieu tout-puissant, elle sera capable de renverser les plus puissants ennemis. Par conséquent, il convient de ne pas prendre le phénomène de la mondialisation, et surtout ses conséquences mauvaises quant à la déchristianisation de la société, comme un fait inéluctable.

*

Remarquons au passage, dans cette argumentation de M. l'abbé Beaumont, une méconnaissance grave de la réalité. S'il n'y a plus d'État catholique aujourd'hui, ce n'est pas tant le fait de la mondialisation, que le fait de la trahison des autorités romaines. C'est Rome, la Rome conciliaire et moderniste, qui a obligé tous les États catholiques à changer leurs constitutions et à revoir leur concordat pour y appliquer la nouvelle doctrine de Vatican II. La mondialisation n'a pas supprimé les Etats protestants, juif, islamiques. Si Rome n'avait pas cédé, il resterait aujourd'hui des Etats catholiques. Et si le pape et les évêques le voulaient, demain, il pourrait à nouveau y en avoir.

*

L'argumentation de M. l'abbé Beaumont suppose, en outre, que "l'État classique" peut disparaître au profit d"'une pure administration pragmatique, orientée vers l'efficacité technique et la protection des droits individuels, [qui] est par définition dans l'incapacité de définir un bien commun vertueux, a fortiori de dire quelle est la vraie religion". Il conviendrait pourtant de rappeler que "l'État classique" est une réalité de l'ordre naturel (l'homme est par nature un animal politique, disait Aristote). Par conséquent, cet État classique ne peut disparaître tant que la nature humaine existera, et l'enseignement de l'Eglise le concernant sera toujours valable, la loi naturelle ne pouvant pas changer.

*

Enfin, imaginer que la société puisse être régie comme une pure administration sans influence sur les choix de vie des administrés, c'est précisément l'utopie libérale. Ce qu'on demande à l'État, disent les libéraux, c'est qu'il nous laisse la liberté. Que l'État n'intervienne pas dans les questions morales et religieuses, sauf dans le cas de trouble de l'ordre public, et tout ira pour le mieux[4]. M. l'abbé Beaumont oublie de nous dire que ce libéralisme est un péché, et qu'il a bel et bien été condamné par l'Eglise.

*

La nouvelle théologie de M. l'abbé Beaumont, reposant sur plusieurs sophismes, où va-t-elle ? Elle conduit à semer le trouble dans les esprits et à baisser les bras devant les ennemis de l'Église. En cela, cette nouvelle théologie nous rappelle les erreurs de Paul Sernine. Au lieu de s'en prendre aux ennemis de l'Eglise qui complotent contre elle, ce dernier a dénoncé l'erreur des "conspirationnistes" (ceux qui dénoncent ces complots)[5].

Quant à nous, nous préférons nous en tenir à la doctrine traditionnelle des papes et des meilleurs théologiens : il y a bien une conjuration anti-chrétienne qui cherche à détruire l'Église par le biais de la mondialisation, mais l'Église a les moyens de la vaincre et de rétablir le règne du Christ-Roi[6]. Terminons cette recension par le début de l'allocution de Pie IX dans le consistoire secret du 18 mars 1861 qui rappelle cette lutte séculaire entre le bien et le mal :

« Depuis longtemps déjà, Nous sommes témoins des agitations dans lesquelles est jetée la société civile, surtout à notre malheureuse époque, par la lutte violente que se livrent des principes opposés, la vérité et l'erreur, la vertu et le vice, la lumière et les ténèbres. Car certains hommes, d'une part, favorisent ce qu'ils appellent la civilisation moderne ; d'autres, au contraire, défendent les droits de la justice et de notre sainte religion. Les premiers demandent que le pontife romain se réconcilie et se mette d'accord avec le progrès, avec le libéralisme (ce sont leurs expressions), en un mot avec la civilisation moderne. Mais les autres réclament, avec raison, que les principes immobiles et inébranlables de l'éternelle justice soient conservés sans altération ; ils réclament que l'on garde intacte la force salutaire de notre divine religion, qui peut seule étendre la gloire de Dieu, apporter des remèdes salutaires aux maux qui affligent l'humanité, et qui est l'unique et véritable règle par laquelle les enfants des hommes puissent, dans cette vie mortelle, acquérir toute vertu et se diriger vers le port de l'éternité bienheureuse. Mais les défenseurs de la civilisation moderne ne comprennent pas cette opposition, bien qu'ils se disent les vrais et sincères amis de la religion ».

Annexe - Extraits du Schéma du cardinal Ottaviani sur les rapports entre l'Église et l'État,

préparé pour le concile Vatican II

Le schéma rappelle d'abord les devoirs religieux du pouvoir civil en général :

Le pouvoir civil ne peut être indifférent à l'égard de la religion. Institué par Dieu afin d'aider les hommes à acquérir une perfection vraiment humaine, il doit, non seulement fournir à ses sujets la possibilité de se procurer les biens temporels, — soit matériels, soit intellectuels —, mais encore favoriser l'affluence des biens spirituels leur permettant de mener religieusement leur vie humaine. Or, parmi ces biens, rien de plus important que de connaître et de reconnaître Dieu, puis de remplir ses devoirs envers Dieu : c'est là, en effet, le fondement de toute vertu privée et, plus encore, publique[7]. Ces devoirs envers Dieu obligent envers la Majesté divine, non seulement chacun des citoyens, mais aussi le pouvoir civil, lequel, dans les actes publics, incarne la société civile. Dieu est, en effet, l'auteur de la société civile et la source de tous les biens qui, par elle, découlent sur tous ses membres. La société civile doit donc honorer Dieu et lui rendre un culte[8]. [...]

Ces principes généraux sont applicables aussi aux États non-catholiques. Le schéma l'indique explicitement, puisque, après un chapitre sur le "Principe général d'application de la doctrine exposée" et deux chapitres d'application à une société catholique, il a tout un chapitre intitulé : "Application dans une cité non-catholique". Le voici :

Dans les cités où une grande partie des citoyens ne professent pas la foi catholique ou ne connaissent même pas le fait de la Révélation, le pouvoir civil non-catholique doit, en matière de religion, se conformer à tout le moins aux préceptes de la loi naturelle[9].

Dans ces conditions, ce pouvoir non-catholique doit concéder la liberté civile à tous les cultes qui ne s'opposent pas à la religion naturelle.

Cette liberté ne s'oppose pas alors aux principes catholiques, étant donné qu'elle convient tant au bien de l'Église qu'à celui de l'État.

Dans les cités où le pouvoir ne professe pas la religion catholique, les citoyens catholiques ont surtout le devoir d'obtenir, par leurs vertus et actions civiques grâce auxquelles, avec leurs concitoyens, ils promeuvent le bien commun de l'État, qu'on accorde à l'Église la pleine liberté d'accomplir sa mission divine[10].

De la libre action de l'Église, en effet, la cité non-catholique, elle aussi, ne subit aucun dommage et retire même de nombreux et insignes bienfaits. Ainsi donc, les citoyens catholiques doivent s'efforcer à ce que l'Église et le pouvoir civil, bien qu'encore séparés juridiquement, se prêtent une aide mutuelle bienveillante.

Afin de ne pas nuire, par maladresse ou par zèle imprudent, soit à l'Église soit à l'État, les citoyens catholiques, dans la défense des droits de Dieu et de l'Église, doivent se soumettre au jugement de l'autorité ecclésiastique : à elle appartient de juger du bien de l'Église[11], selon les diverses circonstances, et de diriger les citoyens catholiques dans les actions civiles qui défendent l'autel[12].

SACERDOS

Fin de l’article de Lecture et Tradition

Déjà au premier semestre 2005, cet article de l’abbé Celier-Beaumont avait été réfuté par Arnaud de Lassus.

Début l’article d’Arnaud de Lassus

Réponse d’Arnaud de Lassus à l’abbé Grégoire Celier. Publié sur www.controverses.com

La Royauté sociale de Notre Seigneur Jésus-Christ mise aux oubliettes ?

Fidèle à l’orientation générale donnée par le livre de Jean Ousset Pour qu’Il règne, l’AFS s’est toujours efforcée de défendre la Royauté sociale de Notre Seigneur Jésus-Christ, doctrine fondamentale sur laquelle repose l’ordre social et qui a été mise aux oubliettes à la suite du concile Vatican II. Elle concluait sa brochure La liberté religieuse trente ans après Vatican II (rédigée en 1995) par la supplique suivante :

A la requête qu’exprimait Jean Madiran : « Très saint Père, rendez-nous l’Ecriture, le catéchisme et la messe » [1][1], il faudrait donc ajouter : « Très saint Père, rendez-nous le Christ-Roi ».

Sur cette même question, la Fraternité saint Pie X, depuis plus de trente ans, a publié des études de premier ordre. Qu’il suffise de citer ici les livres de Mgr Lefebvre « Ils L’ont découronné » et « Mes doutes sur la liberté religieuse » (édit.Clovis).

Dans le n°163 (janvier février 2005) de la revue Fideliter figure un article de l’abbé Michel Beaumont, intitulé « Réfléchir en chrétien sur la politique actuelle » et donnant un son de cloche assez différent des documents précités. En voici un résumé ainsi que les réflexions qu’il suggère.

LES IDÉES DE L’ABBÉ BEAUMONT

● Comment est présentée la doctrine de l’Église sur les rapports Église-Etat

L’abbé Beaumont insiste sur trois points :

- Cette doctrine ne se situerait que dans l’optique d’une société catholique :

Dans ces enseignements doctrinaux, même lorsqu’ils traitent de cas limites (…), les papes se situent toujours dans l’optique d’une « société catholique », qui doit prendre en compte des réalités religieuses minoritaires. (p.21)

- Cette doctrine n’avait rien de spécifique pour les États non catholiques :

A notre connaissance toutefois, jusqu’à Pie XII, il n’existe pas de document doctrinal traitant des obligations religieuses d’un État non catholique. (p.21)

- Cette doctrine ne se réfèrerait qu’à la conception classique de l’État :

Lorsqu’ils adressent des enseignements doctrinaux à une « société catholique », les papes se réfèrent en même temps à une « conception classique » de l’autorité politique et de l’État. En gros, ils parlent à une communauté politique où un dux (roi, président, premier ministre, etc.) a la charge de mener le peuple vers un bien commun défini par des valeurs spirituelles, culturelles et matérielles proprement humaines. (p.21)

La mondialisation fait disparaître la possibilité même d’une société majoritairement catholique et d’un État classique

Peut-il exister encore, en n’importe quel point de la terre, une société majoritairement catholique ? La question n’est pas de fait, mais de droit. Car la mondialisation semble faire de toute société, de tout État nation, un simple territoire du « village global ». De ce fait, même un pays qui comprendrait une majorité de catholiques verrait cette majorité devenir automatiquement minorité dans le cadre du « pays-monde ». (p.22)

-Quant à l’État classique, il disparaît lui aussi :

La dissolution du pouvoir politique, son éclatement entre de multiples nouveaux centres de pouvoir, est une réalité qui ne cesse de s’affirmer. (p.24)

La doctrine classique des papes ne serait plus « possible »

Si, en vertu de l’actuelle mondialisation, tout pays, devenu un simple territoire du « village global », se trouve inséré dans une entité politique où les catholiques sont très nettement minoritaires, comment la doctrine classique des papes demandant qu’un pays majoritairement catholique reconnaisse le règne du Christ dans ses institutions politiques serait-elle encore possible ? Dans cette hypothèse, nous assisterions à la disparition radicale de la notion d’une « société majoritairement catholique » et donc, par conséquent, du concept d’État catholique, au sens où l’entendaient les papes. (p.23)

RÉFLEXIONS SUR LES IDÉES DE L’ABBÉ BEAUMONT

Il y a beaucoup de choses vraies dans les constats de l’abbé Beaumont sur le phénomène de mondialisation. En revanche, nous paraît défectueuse la manière dont il considère la doctrine de l’Église sur les rapports Église-État.

● Une doctrine qui serait liée à des circonstances particulières

La doctrine de l’Église serait faite pour une société majoritairement catholique et un État classique.

Mais non ! Elle est faite pour tous les temps, pour tous les types de sociétés, qu’elles soient catholiques ou non, pour tous les types de pouvoirs politiques, qu’ils soient classiques ou « éclatés entre de multiples nouveaux centres de pouvoir ».

Pour la doctrine qui nous intéresse ici, la chose a été précisée par Pie XI dans ce passage de l’encyclique Quas primas instituant la fête de la Royauté du Christ :

En cette matière ( la Royauté du Christ), il ne faut pas distinguer entre les individus et les sociétés domestiques et civiles, puisque les hommes réunis en société ne sont pas moins sous la puissance du Christ que les particuliers.

Qu’elle soit ou non applicable dans telle ou telle circonstance, la doctrine reste la doctrine ; elle doit continuer à régner dans les esprits et être professée :

Le plus grand malheur pour un siècle ou un pays, disait Mgr Freppel, c’est l’abandon ou l’amoindrissement de la vérité. On peut se relever de tout le reste ; on ne se relève jamais du sacrifice des principes. Les caractères peuvent fléchir à des moments donnés et les mœurs publiques recevoir quelque atteinte du vice ou du mauvais exemple, mais rien n’est perdu tant que les vraies doctrines restent debout dans leur intégrité. Avec elles, tout se refait tôt ou tard, les hommes et les institutions, parce qu’on est toujours capable de revenir au bien lorsqu’on n’a pas quitté le vrai. Ce qui enlèverait jusqu’à l’espoir même du salut, ce serait la désertion des principes, en dehors desquels il ne se peut rien édifier de solide et de durable.

Aussi, le plus grand service qu’un homme puisse rendre à ses semblables, aux époques de défaillance ou d’obscurcissement, c’est d’affirmer la vérité sans crainte, alors même qu’on ne l’écouterait pas ; car c’est un sillon de lumière qu’il ouvre à travers les intelligences, et, si sa voix ne parvient pas à dominer les bruits du moment, du moins sera-t-elle recueillie dans l’avenir comme la messagère du salut ». [2][2]

La doctrine sur les rapports entre l’Église et l’État est, répétons-le, faite pour tous les temps et pour tous les cas de figure. Il n’existe pas, il ne peut pas exister une doctrine pour les États non catholiques à côté d’une doctrine pour les États catholiques, pas plus qu’il n’existe une doctrine du mariage pour les divorcés à côté d’une doctrine du mariage pour les couples fidèles. Aussi, ne comprend-on pas la remarque de l’abbé Beaumont :

(…) A notre connaissance toutefois, jusqu’à Pie XII, il n’existe pas de document doctrinal traitant des obligations religieuses d’un État non catholique.

Si la doctrine ne change pas, ses conditions d’application changent. Et c’est là que peut intervenir un « éclairage magistériel ». [3][3] Pour la doctrine sur les rapports entre l’Église et l’État, un tel éclairage, depuis quarante ans, est soit inexistant soit défaillant .[4][4]L’abbéBeaumontapleinementraison de soulignerce point. [5][5]

● Un raisonnement du type thèse-hypothèse

On se rappelle l’argumentation utilisée par Mgr Dupanloup, en 1864, pour escamoter la doctrine anti-libérale affichée dans l’encyclique Quanta Cura etle Syllabus du bienheureux Pie IX.

La doctrine (appelée thèse) est considérée comme magnifique mais inapplicable ; on la couvrira de louanges avant de l’oublier et de s’intéresser (sans éclairage doctrinal) à la situation présente qualifiée d’hypothèse. [6][6]

En suggérant que la doctrine de l’Église serait liée à telle ou telle circonstance (société majoritairement catholique, État de type classique), l’abbé Beaumont se rapproche de la position libérale de Mgr Dupanloup avec sa formule thèse-hypothèse.

L’impossibilité d’une société majoritairement catholique

Dans les circonstances actuelles, l’existence d’une société majoritairement catholique devient humainement de plus en plus improbable.

Mais les circonstances peuvent changer. Le retour de sociétés majoritairement catholiques et d’États catholiques est ainsi annoncé dans le message de la Salette pour la période qui suivra immédiatement la mort de l’Antéchrist :

Tout à coup, les persécuteurs de l’Église de Jésus-Christ et tous les hommes adonnés au péché périront et la terre deviendra comme un désert. Alors se fera la paix, la réconciliation de Dieu avec les hommes ; Jésus-Christ sera servi, adoré et glorifié ; la charité fleurira partout. Les nouveaux rois seront le bras droit de la sainte Église, qui sera forte, humble, pieuse, pauvre, zélée et imitatrice des vertus de Jésus-Christ. LÉvangile sera prêché partout, et les hommes feront de grands progrès dans la foi, parce qu’il y aura unité parmi les ouvriers de Jésus-Christ et que les hommes vivront dans la crainte de Dieu. [7][7]

Texte à rapprocher de ce passage de la deuxième partie du secret de Fatima :

A la fin, mon Cœur Immaculé triomphera. Le Saint-Père me consacrera la Russie qui se convertira, et il sera donné au monde un certain temps de paix [8][8]

*

En conclusion, prenons au sérieux le diagnostic de saint Pie X au sujet de la France , diagnostic fait en 1906 et en harmonie avec le message de la Salette :

Le salut de la France ne peut être obtenu que par la reconnaissance du règne du Christ sur la nation. [9][9]

Et restons fidèles à la doctrine de la Royauté sociale de Notre Seigneur. Nous savons qu’un jour elle sera mise en pratique et si, à notre époque, elle paraît inapplicable ou peu applicable, elle doit être professée avec d’autant plus d’énergie, suivant le conseil de dom Guéranger :

Il y a une grâce attachée à la confession pleine et entière de la vérité. Cette confession, nous dit l’Apôtre, est le salut de ceux qui la font et l’expérience démontre qu’elle est aussi le salut de ceux qui l’entendent. [10][10]

Arnaud de Lassus

Textes de saint Jean Chrysostome sur la conversion des Juifs à la fin du monde

Interrogeons les Juifs, et demandons-leur si Jésus-Christ ne leur a pas envoyé des prophètes et des sages ? S’ils ne les ont pas tués dans leurs synagogues ? Si leurs maisons et leurs villes n’ont pas été entièrement ruinées ; et si tous les maux que le Sauveur leur a prédits ne leur sont pas arrivés ? Nul d’entre eux ne le niera. Comme donc jusqu’ici toutes ces prédictions ont été vérifiées peut-on douter que le reste n’arrive de même, que les Juifs ne reconnaissent un jour que Jésus-Christ est le vrai Dieu, et qu’ils ne soient forcés de se soumettre à sa souveraine puissance ? Mais ces respects forcés, et ces hommages contraints ne leur serviront de rien, pas plus que leurs regrets et leurs larmes autrefois ne purent empêcher que leur ville ne fût détruite.

Commentaire sur saint Matthieu, Homélie 74

Peut-être certains hommes oseront prétendre que le crucifié n’est pas le Christ qui est attendu, qu’un autre que lui viendra : mais saint Paul nous dit que le Christ d’hier et d’aujourd’hui est le même pour tous les siècles ; c’est déclarer évidemment que le Messie déjà venu, viendra de nouveau, que le même était, est et sera dans l’éternité. A l’heure même où nous sommes, les juifs prétendent qu’un autre viendra, et comme ils se sont eux-mêmes privés du Christ véritable, ils tomberont dans les filets de l’antéchrist.

Commentaire sur l’épître aux Hébreux, Homélie, 33, 2


[1][1] Itinéraires, juillet-octobre 1988.

[2][2]Mgr Freppel, cité par Jean Ousset, L’action, p.213.

[3][3] Expression de l’abbé Beaumont.

[4][4] L’ « éclairage magistériel » est défaillant parce qu’une doctrine nouvelle (non compatible avec la doctrine traditionnelle) a été introduite par la Déclaration conciliaire sur la liberté religieuse ; doctrine qui, telle qu’elle a été appliquée depuis 40 ans, aboutit à la séparation de l’Église et de l’État (voir à ce sujet, dans le présent numéro, l’aide-mémoire sur la liberté religieuse).

On pourra se reporter par ailleurs à l’article Emile Poulat et la laïcité du n°175 (octobre 2004) de l’AFS. Y étaient commentés les prises de position de cet auteur (et à sa suite de l’abbé Guillaume de Tanouärn) en faveur de la loi de 1905, loi qui posait clairement le principe de la séparation de l’Église et de l’État.

[5][5] On pourrait remarquer que, sur d’autres questions importantes, l’éclairage magistériel n’existe pas non plus ; il fait défaut, depuis plus de deux siècles, sur la doctrine de l’Église sur l’argent.

[6][6]L’argumentation thèse-hypothèse est ainsi présentée par l’abbé A. Roussel dans son livre Libéralisme et catholicisme, p.96 : « Le « Catholique-libéral », lui, sépare la fin et les moyens, la théorie et la pratique ; pis encore, il les oppose jusqu’à les rendre incompatibles. Pour lui, la « thèse » c’est l’ «idéal » impossible, l’absolu chimérique, l’abstrait irréel ; l’ »hypothèse » c’est le « possible », le concret, le réel (…). Il ne veut pas voir qu’entre l’oubli de la thèse et sa réalisation immédiate et complète il y a le milieu, « juste » cette fois, qui consiste à la vouloir sans cesse et à la réaliser le plus possible dans les circonstances données. Au lieu de voir d’abord la « thèse », c’est-à-dire la fin à vouloir et les règles générales et particulières de son application que fournit la théorie, pour ensuite l’affirmer franchement et la réaliser prudemment, il s’enferme dans la complexité obscure des cas individuels et, hypnotisé par les difficultés pratiques de l’ « hypo-thèse », il en vient à minimiser ou même à dissimuler la « thèse » : ainsi ce n’est plus la théorie qui règle la pratique, c’est la pratique qui mesure la théorie ».

[7][7]Le texte du message de la Salette est reproduit dans les brochures AFS « Notre-Dame de la Salette , le cent cinquantième anniversaire de l’apparition » et « Un éclair dans le ciel, Fatima ».

[8][8] Cf. la brochure AFS Un éclair dans le ciel, Fatima, p. 38.

[9][9] Saint Pie X, lettre à l’abbé Debout, 8 mai 1906.

[10][10] Dom Guéranger, Le sens chrétien de l’histoire, p.53 (Edit. Plon).

Fin de l’article d’Arnaud de Lassus

Avant tout commentaire de notre part, voici quelques passages bien oubliés de Ils L’ont découronné de Mgr Lefebvre, p. 210 et 211. Au fait, qui parle encore de ce livre ? Fideliter  en parle-t-il ?

Début de la citation de Mgr Lefebvre

Mort du RÈgne social de Notre Seigneur JÉsus-Christ

Or si l'Etat ne se reconnaît plus un devoir singulier envers la vraie religion du vrai Dieu, le bien commun de la société civile n'est plus ordonné à la cité céleste des bienheureux, et la Cité de Dieu sur terre, c'est-à-dire l'Eglise, se trouve privée de son influence bénéfique et unique sur toute la vie publique ! Qu'on le veuille ou non, la vie sociale s'organise en dehors de la vérité, en dehors de la loi divine. La société devient athée. C'est la mort du Règne social de Notre Seigneur Jésus-Christ.

C'est bien ce que Vatican II a fait, quand Mgr De Smedt, rapporteur du schéma sur la liberté religieuse, a affirmé à trois reprises : «L'Etat n'est pas une autorité compétente pour porter un jugement de vérité ou de fausseté en matière religieuse » (Relatio de reemendatione schematis emendati, 28 mai 1965, document 4 SC). Quelle plus monstrueuse déclaration de ce que Notre Seigneur n'a plus le droit de régner, de régner seul, d'imprégner toutes les lois civiles de la loi de l'Evangile.

Combien de fois Pie XII n'avait-il pas condamné un tel positivisme juridique (Pie XII, Lettre du 19 octobre 1945 pour la XIXè Semaine Sociale des catholiques italiens, AAS. 37, 274 ; Allocution Con vivo compiacimento, du 13 novembre 1945 au Tribunal de la Rote, PIN. 1064, 1072), qui prétendait qu'on doit séparer l'ordre juridique de l'ordre moral, parce que l'on ne saurait exprimer en termes juridiques la distinction entre la vraie et les fausses religions ! - Relisez le Fuero de los espanoles !

Bien plus, impiété insurpassable, le Concile a voulu que l'Etat, libéré de ses devoirs envers Dieu, devienne désormais le garant de ce qu'aucune religion «ne soit empêchée de manifester librement l'efficacité singulière de sa doctrine pour organiser la société et vivifier toute l'activité humaine» (DH. 4). Vatican II invite donc Notre-Seigneur à venir organiser et vivifier la société, de concert avec Luther, Mahomet et Bouddha ! c'est ce que Jean-Paul II a voulu réaliser à Assise ! Projet impie et blasphématoire !

Jadis, l'union entre l'Eglise et l'Etat catholique eut pour fruit la Cité catholique, réalisation parfaite du Règne social de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Aujourd'hui, l'Eglise de Vatican II, mariée à l'Etat qu'elle veut athée, enfante de cette union adultère la société pluraliste, la Babel des religions, la Cité indifférentiste, objet de tous les désirs de la Franc-Maçonnerie.

Au chapitre XV de son livre, Mgr Lefebvre avait dénoncé la méthode des libéraux

CHAPITRE XV - LA GRANDE TRAHISON

Réconcilier l'Eglise avec la Révolution, telle est l'entreprise des libéraux dits catholiques

A la doctrine catholique du Règne social de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de l'union entre l'Eglise et l'Etat, les libéraux dits catholiques objectent qu'elle est sans doute vraie, mais inapplicable, même dans les pays catholiques :

- Dans la théorie, on peut accepter la thèse proposée par les papes et les théologiens.

- Dans la pratique, il faut céder aux circonstances et se placer résolument dans l'hypothèse : promouvoir le pluralisme religieux et la liberté des cultes :

«Les libéraux catholiques n'ont cessé de répondre qu'ils ont une volonté d'orthodoxie égale à celle des plus intransigeants et l'unique souci des intérêts de l'Eglise ; la conciliation qu'ils ont cherchée n'est pas théorique, abstraite, mais pratique » (DTC. T IX, col. 509, article libéralisme catholique).

C'est la fameuse distinction entre la thèse (la doctrine) et l'hypothèse (la pratique dans les circonstances données). Cette distinction, je vous prie de le remarquer, est susceptible d'une interprétation correcte : l'application des principes doit tenir compte des circonstances et ceci se fait par la circonspection, qui est une partie de la vertu de prudence. Ainsi, la présence dans une nation catholique, de fortes minorités musulmane, juive et protestante pourra suggérer une tolérance de ces cultes dans une cité par ailleurs catholique, par un Etat qui continue à reconnaître la vraie religion, parce qu'il croit au Règne social de Notre-Seigneur Jésus-Christ !

Mais attention ! pour les catholiques libéraux il ne s'agit pas de cela ! Selon eux, dans la pratique, les principes, qui sont pourtant par définition des règles d'action, ne doivent pas être appliqués, ni prêchés parce qu'ils sont inapplicables, disent-ils. - C'est évidemment faux : faut-il renoncer à prêcher et à appliquer les commandements de Dieu «tu n'auras qu'un seul Dieu», «tu ne tueras point», «tu ne feras pas d'adultère», parce que les gens n'en veulent plus ? parce que la mentalité tend à la libération de toute tutelle morale ? Faut-il renoncer au Règne social de Jésus-Christ dans le pays sous prétexte que Mahomet ou Bouddha y demandent une place ? - En somme ils refusent de croire à l'efficacité pratique de la vérité. Ils pensent pouvoir encore affirmer les principes catholiques en théorie, et agir toujours à rebours de ces principes : c'est l'incohérence intrinsèque des libéraux dits catholiques.

Voici ce qu'en dit le cardinal Billot, s.j. :

«Le libéralisme des «catholiques libéraux» échappe à toute classification et n'a qu'une seule note distinctive et caractéristique, celle de la parfaite et absolue incohérence» (P. Le Floch, Le cardinal Billot, lumière de la théologie, p. 57).

Et le cardinal relève que le titre de «catholique libéral» lui-même est une contradiction dans les termes, une incohérence, puisque «catholique» suppose sujétion à l'ordre des choses humain et divin, tandis que «libéral» signifie précisément émancipation de cet ordre, révolte contre Notre Seigneur Jésus-Christ.

Voici, pour finir, comment le cardinal Billot juge la fameuse distinction entre thèse et hypothèse des libéraux dits catholiques :

«De ce que l'ordre concret des choses diffère des conditions idéales de la théorie, il s'ensuit que les choses concrètes n'auront jamais la perfection de l'idéal, mais il ne s'ensuit rien de plus».

Ainsi, du fait de l'existence de minorités dissidentes dans une nation catholique, il suit que l'unanimité religieuse ne sera jamais réalisée parfaitement, peut-être, que le règne social de Jésus-Christ n'aura jamais la perfection qu'exposent les principes ; mais il ne s'ensuit pas que ce Règne soit à écarter en pratique et que le pluralisme religieux doive devenir la règle !

Vous voyez donc déjà qu'il y a dans le catholicisme libéral (terme que j'utilise avec répugnance, parce qu'il est un blasphème) une trahison des principes qui refuse de s'avouer, une apostasie pratique de la foi dans le Règne social de Notre-Seigneur Jésus-Christ. C'est à juste titre que l'on peut dire : «le libéralisme est un péché» (Dom Félix Sarda y Salvany), en parlant du libéralisme catholique.

Il y a aussi, j'y reviendrai dans l'entretien suivant, un confusionnisme intellectuel au fond de cette erreur, une manie des confusions entretenues, un refus de rien définir : telle cette confusion entre tolérance et tolérantisme : la tolérance est un principe catholique, elle est, dans certaines circonstances, un devoir de charité et de prudence politique envers les minorités ; le tolérantisme au contraire est une erreur libérale qui veut accorder à tous les dissidents indistinctement et en toutes circonstances, et en justice les mêmes droits que ceux dont jouissent ceux qui sont dans la vérité, morale ou religieuse. Or, comme on peut le remarquer dans d'autres domaines, c'est bouleverser l'ordre social que de faire de la charité une justice, c'est tuer la justice et la charité.

Plus loin, Mgr Lefebvre est encore plus précis :

CHAPITRE XVII - LES PAPES ET LE CATHOLICISME LIBÉRAL

«Le libéralisme catholique est un véritable fléau» Pie IX

L'abbé Roussel a rassemblé dans son livre (Libéralisme et catholicisme, 1926) toute une série de déclarations du pape Pie IX condamnant la tentative catholique libérale de marier l'Eglise et la Révolution. En voici quelques-unes, qu'il nous est bon de méditer.

«Ce qui afflige votre pays et l'empêche de mériter les bénédictions de Dieu, c'est ce mélange de principes. Je dirai le mot et ne le tairai pas ; ce que je crains, ce ne sont pas tous ces misérables de la Commune de Paris... Ce que je crains, c'est cette malheureuse politique, ce libéralisme catholique qui est le véritable fléau... Ce jeu de bascule qui détruirait la Religion. Il faut sans doute pratiquer la charité, faire ce qui est possible pour ramener ceux qui sont égarés ; il n'est cependant pas besoin pour cela de partager leurs opinions... » (Aux pèlerins de Nevers, juin 1871).

*

«Avertissez donc, vénérable Frère (l'Evêque de Quimper) les membres de l'Association Catholique que, dans les nombreuses occasions où Nous avons repris les sectateurs des opinions libérales, Nous n'avons pas eu en vue ceux qui haïssent l'Eglise et qu'il eût été inutile de désigner ; mais bien ceux que Nous venons de signaler, lesquels, conservant et entretenant le virus caché des principes libéraux qu'ils ont sucé avec le lait, sous prétexte qu'il n'est pas infecté d'une malice manifeste et n'est pas, suivant eux, nuisible à la Religion, l'inoculent aisément aux esprits, et propagent ainsi les semences de ces révolutions dont le monde est depuis longtemps ébranlé» (Bref à un cercle catholique de Quimper, 1873).

«Cependant, et bien que les enfants du siècle soient plus habiles que les enfants de la lumière, leurs ruses (des ennemis de l'Eglise) auraient sans doute moins de succès si un grand nombre parmi ceux qui portent le nom de catholiques, ne leur tendaient une main amie. Oui, hélas ! il y en a qui ont l'air de vouloir marcher d'accord avec nos ennemis, et s'efforcent d'établir une alliance entre la lumière et les ténèbres, un accord entre la justice et l'iniquité, au moyen de ces doctrines qu'on appelle «catholiques-libérales», lesquelles, s'appuyant sur les principes les plus pernicieux, flattent le pouvoir laïque quand il envahit les choses spirituelles et poussent les esprits au respect, ou tout au moins, à la tolérance des lois les plus iniques, absolument comme s'il n'était pas écrit que personne ne peut servir deux maîtres. Or ceux-ci sont plus dangereux assurément et plus funestes que des ennemis déclarés, et parce qu'ils secondent leurs efforts sans être remarqués, peut-être sans s'en douter, et, parce que, se maintenant sur l'extrême limite des opinions formellement condamnées, ils se donnent une certaine apparence d'intégrité et de doctrine irréprochable, alléchant ainsi les imprudents amateurs de conciliation et trompant les gens honnêtes, lesquels se révolteraient contre une erreur déclarée. De la sorte, ils divisent les esprits, déchirent l'unité et affaiblissent les forces qu'il faudrait réunir pour les tourner toutes ensembles contre l'ennemi... » (Bref au Cercle catholique de Milan, 1873).

«Nous ne pouvons que vous approuver d'avoir entrepris de défendre et d'expliquer les décisions de Notre Syllabus, surtout celles qui condamnent le Libéralisme soi-disant catholique, lequel comptant un grand nombre d'adhérents parmi les hommes honnêtes eux-mêmes, et paraissant s'écarter moins de la vérité, est plus dangereux pour les autres, trompe plus facilement ceux qui ne se tiennent pas sur leurs gardes et, détruisant l'esprit catholique insensiblement et d'une manière cachée, diminue les forces des catholiques et augmente celle des ennemis» (Bref aux rédacteurs d'un journal catholique de Rodez, décembre 1876).

*

Que les catholiques libéraux osent, après de telles condamnations, refuser les qualificatifs de traîtres, de transfuges, d'ennemis dangereux de l'Eglise !

Voici, pour en finir avec le catholicisme libéral considéré en général, le jugement d'un témoin autorisé : Emile Keller, député français en 1865, dans son livre Le Syllabus de Pie IX - Pie IX et les principes de 89 (p. 13):

«Quelle est donc cette transaction que l'on poursuit depuis de longues années et qui se formule aujourd'hui d'une façon de plus en plus pressante ? Quelle place veut-on faire à l'Eglise dans un édifice dont elle devait d'abord être exclue ? Libéraux et gouvernants l'acceptent volontiers pour auxiliaire. Mais se réservent en dehors d'elle et de son autorité leur pleine indépendance, leur souveraineté sans limite et leur entière liberté d'action. Ils lui abandonnent le domaine des consciences pourvu que de son côté elle leur livre la politique et qu'elle reconnaisse l'efficacité sociale des idées modernes connues sous le nom de principes de 89. Pris à ce piège séduisant bien des esprits généreux ne comprennent pas que ces propositions si modérées se puissent refuser. Les uns s'éloignent de l'Eglise s'imaginant, chose absurde, que réellement elle exige le sacrifice du progrès et de la liberté. Certains du contraire, mais n'osant pas nier la vertu des formules modernes, les autres font de laborieux efforts pour décider comme eux l'Eglise à la réconciliation qu'on lui offre. A force de bonne volonté ils croient s'être prouvé à eux-mêmes qu'à part quelques nuances, les principes de 1789 sont des purs principes chrétiens, qu'il serait habile de s'en emparer et de les amener graduellement et sans secousse à être reconnus et bénis du Saint Siège».

C'est cela ! C'est exactement ce qui s'est passé au moment du concile Vatican II : les libéraux ont réussi à faire bénir par le pape et par le Concile les principes de 1789.

Fin de la citation de Mgr Lefebvre

Voilà l’enseignement de toujours, l’enseignement de la Vérité, l’enseignement de Mgr Lefebvre sur le libéralisme.

Au jugement de Mgr Lefebvre, l’abbé Beaumont, dans la mesure où il est un catholique libéral, serait « transfuge » et « ennemi dangereux de l'Eglise ! » Il est évident que le Règne du Sacré-Cœur est le dernier des soucis de ce personnage. Il est évident que, sur ce point, il ne partage pas du tout le même combat que celui de Mgr Lefebvre. Il n’est malheureusement plus le seul dans la Tradition.

Il n’y a eu, hélas, aucun rectificatif dans aucune revue de la FSSPX. Etait-ce une exigence de Rome ? L’article de Lecture et Tradition le souligne. Nous le pensons aussi. Ce sont de tels procédés qui nous laissent crainte la volonté de ralliement-apostasie de la part de cette équipe en place.

A la lecture de tels documents, au réquisitoire de Lecture et Tradition (qui proviendrait du moine d’Avrillé), à la lecture de la réfutation faite par Arnaud de Lassus, il est clair que l’abbé Célier-Beaumont est un libéral, œuvrant pour une "réconciliation". Il ne suffit pas qu’il ait commis une petite brochure-prétexte et sans envergure sur l’antilibéralisme pour nous faire croire qu’il est du camp des antilibéraux. On sait depuis longtemps qu’il a écrit cette brochure afin de tenter de se réhabiliter après son scandaleux La Paille et le Sycomore.

On est donc bien obligé de comprendre que cet abbé, qui occupe une responsabilité aussi importante, est "couvert", qu’il continue à être protégé, malgré tous les écrits scandaleux qui s’accumulent depuis le Dieu Mortel. Alors qui le couvre ? L’abbé Schmidberger ? Pour quelles raisons continue-t-on à le couvrir ?

Si l’on en croit notre source, parvenir à censurer une réponse catholique en intervenant sur la revue Le Sel de la Terre, et ainsi contraindre l’auteur de l’article à faire passer son texte dans une revue amie, laisse à penser combien la perversion dogmatique de l’article de l’abbé Beaumont doit être accompagnée de pressions graves et insistantes pour réussir à imposer l’autocensure à cette revue dominicaine qui est censée combattre pour la Foi catholique. Cela en dit également long également sur la prétendue fermeté de cette revue.

Cette petite "équipe" qui tient la FSSPX et que nous dénonçons ici sans relâche est maintenant prête à utiliser tous les moyens pour nous faire taire. Mais elle ne nous empêchera pas de crier la Vérité autant que nous le pourrons.

Nous continuons le bon combat.

Abbé Michel Marchiset

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[1] Disponible en français sur le site www.virgo-maria.org

[2] Cet argument n'est pas sans analogie avec un sophisme de Paul Sernine sur le "silence du magistère" dans La paille et le sycomore. Dans les deux cas on réduit le magistère aux enseignements des papes (et encore, sans tout citer).

[3] Ce texte a été publié dans Le Sel de la Terre, n°39, avec des commentaires.

[4] Un exemple de libéralisme est donné dans le même numéro de Fideliter dont la page de couverture est ornée d'une photographie de Rocco Buttiglione. A la page 4, dans la présentation du dossier sur l'engagement chrétien en politique, il est rapporté un propos de ce personnage : "Pour moi, catholique, l'homosexualité est un péché. Mais en tant que commissaire européen, j'appliquerai les lois qui protègent les minorités, y compris homosexuelles". Dans sa vie privée, Buttiglione a donc des convictions. Mais dans sa vie publique, il laisse la liberté à tous, y compris pour le vice. La phrase de Buttglione est qualifiée de "toute simple, si "politiquement correcte" apparemment". Il aurait été plus juste de dire : "si parfaitement libérale".

[5] "A travers le système de Couvert, ce qui est visé par Sernine, c'est le conspirationnisme de l'auteur", nous a confié son éditeur dans La Nouvelle Revue Certitudes, n° 13, janvier 2004.

[6] Voir par exemple : Dominicus, Petit catéchisme sur la Contre-Église, la gnose et le complot, nouvelle édition, Éd. du Sel (2005).

[7] Léon XIII, encyclique Libertas prastantissimum, 20 juin 1888, AAS 20 (1887), p. 603 ; – ID., encyclique Sapientiæ christiana, 10 janvier 1890, AAS 22 (1889/90), p. 385 ; – ID., encyclique Au milieu des sollicitudes, 16 février 1892, AAS 24 (1891/92), p. 320.

[8] Léon XIII, encyclique Humanum genus, 20 avril 1884, AAS 16 (1883), p. 427 ; – ID., encyclique Immortale Dei, 1er novembre 1885, AAS 18 (1885), p. 163 ; – ID., encyclique Libertas proestantissimum, 20 juin 1888, AAS 20 (1887), p. 604 ; – ID., encyclique Au milieu des sollicitudes, 16 février 1892, AAS 24 (1891/92), p. 520 ; AAS 20 (1887), – saint Pie X, encyclique Vehementer Nos, 11 février 1906, AAS 39 (1906), p. 5 ; – ID., alloc. au Consistoire, 21 février 1906: ibid., p. 30-31 (Versailles, éd. Courrier de Rome, t. 1, 1993, p. 345) ; – Pie XI, encyclique Quas primas, 11 décembre 1925, AAS 17 (1925), p. 609 ; – Pie XII, encyclique Mediator Dei, 20 novembre 1947, AAS 39 (1947), p. 525 sq.

[9] Taparelli D'Azeglio, ibid., p. 387.

[10] Léon XIII, encyclique Sapientiæ christianæ, 10 janvier 1890, AAS 22 (1889/90), p. 396-397.

[11] Léon XIII, encyclique Sapientiæ christianæ, 10 janvier 1890, AAS 22 (1889/90), p. 400 ; — PIE XII, alloc. à des juristes catholiques italiens, 6 décembre 1953, AAS 45 (1953), p. 799-800.

[12] Voir Pie XI, Discours aux universitaires catholiques : "Quand la politique s'approche de l'autel, alors la religion, l'Église et le pape qui la représente, sont non seulement dans le droit, mais encore dans le devoir de donner des indications et des directives que des âmes catholiques ont le droit de requérir et le devoir de suivre" (L'Osservatore Romano, 10 septembre 1924). — ID., Discours à la jeunesse catholique : "C'est la politique qui a touché à l'autel. Et Nous défendons alors l'autel. C'est Notre rôle à nous de défendre la religion, les consciences, la sainteté des sacrements " (L'Osservatore Romano, 21-22 septembre 1925).